Meiron, le berceau de la Kabbale

1

En haute Galilée, dans le nord d’Israël, Meiron est un beau village de montagne aux pieds des pentes du mont du même nom culminant à 1208 mètres d’altitude. Ses flans sont couverts d’oliviers et de vergers fort réputés. C’est le site de l’ancienne cité mentionnée dans le Talmud. Le nom de Meiron apparaît également dans plusieurs poèmes liturgiques de la tradition juive. De grande renommée spirituelle, la ville est considérée comme le berceau de la Kabbale.

La région calcaire du Mont Meiron est une des plus pluvieuses d’Israël. En hiver, la montagne est souvent enneigée. Cette pluviométrie favorise une végétation abondante formée de bosquets méditerranéens, de nombreux chênes et de cèdres. Le Mont Meiron est également une des plus grandes réserves naturelles d’Israël, riche en faune et en flore. Il avait déjà été classé comme tel par les Anglais en 1942. Le sentier montagneux traversant des forets plantées par le KKL permet de belles randonnées et offre un étonnant panorama de la haute Galilée. Lorsque la vue est dégagée, elle permet d’embrasser toute la largeur du pays, de la Méditerranée jusqu’au lac de Tibériade et au Golan. Au fur et à mesure des années, plusieurs villages juifs et druzes se sont agrandis au sein de la réserve. Même l’armée s’y est installée (vue la situation géographique stratégique proche de la frontière libanaise), notamment au sommet du mont qu’elle a nivelé pour sa base aérienne.

L’histoire de Meiron remonte à plus de 3280 ans. C’est une des cités apparaissant dans la liste des villes conquises par les pharaons égyptiens Thoutmosis III vers -1458, puis par Ramsès II vers – 1274.

Vers – 1240, lors de la conquête du pays par les Hébreux, la victoire décisive que remporta Josué en ces lieux sur les Cananéens dont Jabin, roi de Hazor et ses alliés, lui permit de dominer le territoire tout entier.

A l’époque des deux royaumes, le roi d’Israël Pékach, fit alliance avec le roi de Syrie, pour envahir et piller le royaume de Juda gouverné par Achab. Ce dernier se tourna alors vers le roi d’Assyrie, Tiglath-Piléser III dont il obtint le secours. Achab se mit ainsi entre les mains du puissant roi d’Assyrie, conquérant ambitieux. Tiglath-Piléser comprit tout le parti qu’il pouvait tirer de cette situation. C’est ainsi qu’en 733-732 avant J.-C., Meiron, entre autres villes du pays, fut reconquise par Tiglath-Pileser.

Sous l’empire romain, Flavius Josèphe, commandant de la Galilée pendant la première révolte juive contre Vespasien, fortifia la cité en l’an 66 après J.-C. et en fit la limite ouest/nord de la haute Galilée. Après la destruction de Jérusalem par les Romains, la population juive s’y concentra ainsi qu’aux alentours pour y poursuivre leur vie spirituelle. Meiron devint le centre d’une petite communauté de paysans.

Lors de la seconde rébellion juive contre les Romains menée par Bar Kochba au deuxième siècle après J.-C., Rabbi Simeon Bar Yohai, animé de sentiments nationalistes anti-romains, fut condamné à mort, suite à une dénonciation, par le gouverneur romain, pour avoir tenu des propos le critiquant. Son fils Eleazer et lui furent alors contraints de se cacher dans une caverne de Meiron pour lui échapper. Ils y restèrent 13 ans. C’est là que Rabbi Simeon Bar Yohai rédigea Livre de la Splendeur (Zohar) autrement dit, la Kabbale.

Avant sa mort, Rabbi Simeon Bar Yohai décréta que les Juifs devaient venir sur sa tombe manger, chanter, prier et étudier la Torah pour garder vivante l’âme juive.

Lorsque les Croisés conquirent le pays, ils séjournèrent aussi à Meiron.

Aujourd’hui, l’actuelle ville de Meiron est proche des vestiges d’une ancienne synagogue de style galiléen, appartenant à la cité antique. Sa façade sud est encore bien conservée. Meiron est toujours restée une ville de pèlerinage où les Juifs viennent se recueillir sur les tombes des sages depuis l’Antiquité, notamment lors de la fête de Lag Baomer (le 33e jour après Pessah), pour l’anniversaire de la mort (hiloula) de Rabbi Shimon Bar Yochai qui a grandement contribué à la Mishna (première partie du Talmud, codification des lois orales de la Bible et des lois politiques et civiles juives). A cette occasion, des centaines de milliers de pèlerins chantent, dansent, allument des feux et y étudient dans la joie. Beaucoup ont aussi coutume de venir à Meiron pour la première coupe de cheveux de leurs garçons de trois ans.

Le mausolée de Rabbi Shimon Bar Yochai, grande figure du Talmud, et de son fils Eliezer, est à la fois un tombeau et une maison de prière et d’étude. Il est formé de coupoles blanches et d’une petite cour carrée en forme de patio. A quelques minutes de marche de l’endroit, se dressent les ruines d’une synagogue du IIe ou IIIe siècle après J.-C., dont les deux portes sud sont dirigées vers Jérusalem. Sa spécificité réside dans sa longueur de 24 mètres, ce qui en fait la plus longue des synagogues de Galilée. Près de l’édifice, se trouvent les vestiges des murailles de la forteresse qui dominait la région ainsi que les caveaux funéraires des sages du Ie siècle, Hillel (docteur juif, premier sage à avoir systématisé l’interprétation de la loi biblique) et Shamai (contemporain du premier, et comme lui, figure majeure de la Mishna).

A Meiron, un Mochav religieux a également été fondé en 1949 par des immigrants hongrois et tchécoslovaques ainsi que par des combattants de la guerre d’Indépendance. Situé près de la yéshiva et ancienne synagogue, il est spécialisé dans la culture de montagne, notamment dans les vergers et le vignoble grâce à son sol crayeux, mais a aussi développé un important élevage de volailles. Sur la face nord-est, un ancien pressoir à vin témoigne déjà de l’existence de vignobles remontant au 16e siècle sur les pentes de la montagne.

Le Mochav compte une population approximative de 620 personnes.

Pour les amoureux de la nature et de cette région, tout comme pour les amateurs d’émotions plus spirituelles, Meiron est le lien parfait entre la belle flore d’Israël et son essence biblique.


Israel Magazine / Noémie Grynberg, 2007