Har Homa : histoire d’un quartier controversé

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Depuis 10 ans, la décision israélienne de construire un nouveau quartier d’habitation au sud de Jérusalem à Har Homa est au cœur d’une polémique nationale et internationale

En février 1997, quelques semaines après avoir signé l’accord sur le désengagement partiel d’Hébron, le gouvernement Likoud de Netanyahu décide d’ériger 6.500 unités de logements à la frontière sud de Jérusalem. Cette initiative vaut au Premier ministre israélien les remontrances publiques de Bill Clinton, alors Président des Etats-Unis. Cependant, ces derniers mettent leur veto à une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU invitant Israël à renoncer à ce projet.

Malgré tout, le 17 mars 1997, commencent les travaux à Har Homa en dépit des mises en garde du Shin Beth contre des troubles arabes dans les territoires. La colère des Palestiniens entraîne la suspension durant 19 mois du processus de paix lancé à Oslo.

Une semaine plus tard, suite à cette décision de construire un nouveau quartier à Har Homa, le Sommet de l’Organisation de la conférence islamique (OCI) réuni à Islamabad au Pakistan, et son Comité Al Qods présidé par le roi Hassan II du Maroc, réagissent avec force contre l’Etat hébreu. De son côté, la Ligue des États arabes préconise à ses 22 membres de geler toute normalisation avec Israël. Les pays non-alignés et ceux de l’Union européenne désapprouvent aussi le comportement de Netanyahu. Pour la première fois depuis longtemps, Londres ne s’aligne pas sur Washington et se range plutôt aux côtés des autres États européens contre la création de ce nouveau quartier.

L’année suivante, 17 mars 1998, l’assemblée générale de l’ONU condamne le non-respect par Israël des résolutions demandant la cessation de la poursuite de la construction d’une nouvelle ‘’implantation’’ sur la colline de Har Homa à Jérusalem.

Poursuivant le combat, en mai 1999, des dizaines de militants du mouvement ‘’La paix maintenant’’ se joignent aux manifestants palestiniens sur le site de Har Homa, pour empêcher par la force la poursuite des travaux. Plusieurs agresseurs sont arrêtés par la police israélienne.

Le gouvernement de Barak (de gauche) tient bon et début 2000, les travaux de construction sont en cours à la périphérie de Jérusalem, notamment à Har Homa. Ceci débouche en novembre 2000 à New York, lors de la 55e session de l’Assemblée générale des Nations Unies, sur un Rapport du Comité spécial chargé d’enquêter sur ‘’les pratiques israéliennes affectant les droits de l’homme du peuple palestinien et des autres arabes des territoires occupés’’.

En mars 2001, en pleine seconde Intifada, une commission d’urbanisme de la municipalité de Jérusalem approuve la construction de près de 3.000 nouveaux logements sur la colline périurbaine de Har Homa. Cette initiative de la capitale hautement symbolique, deux semaines après la prise de fonction d’Ariel Sharon comme Premier ministre, est prétexte à l’agitation palestinienne. Pour Yasser Abed Rabbo, ministre palestinien de l’information de l’époque, Sharon avait annoncé le gel des constructions au-delà de la ligne verte. "S’il ne cesse pas cela, la situation va continuer à se détériorer et ce sera sa faute".

Mais entre janvier 2003 et juin 2005 sont lancés cinq appels d’offres israéliens pour compléter la construction de logements dans le nouveau quartier sud de Jérusalem.

En avril 2004, George W. Bush, candidat pour un second mandat à la tête des Etats-Unis, donne son soutien à Israël concernant sa politique territoriale.

Le 27 août 2005, les Ministères israéliens de l’Aménagement du Territoire et du Logement et de la Construction annoncent l’approbation de la commercialisation de 9 terrains pour la construction de 500 logements supplémentaires à Har Homa.

Début décembre 2007, la présidence de l’Union européenne se déclare inquiète de cette décision du gouvernement israélien. ‘’L’Union européenne considère que cette initiative est passible de perturber les actuels efforts visant la paix et la création de confiance entre les parties à ce moment. L’Union européenne exhorte Israël à ce que les compromis constants de la Feuille de Route soient honorés et que toutes les activités qui puissent nuire à un accord sur le statut final de Jérusalem ou affecter les progrès vers cet objectif soient évitées.’’ La Turquie, la Croatie, la Macédoine, l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, la Serbie, la Norvège, ainsi que l’Ukraine et l’Arménie se rallient à la présente déclaration.

Dans son budget 2008, approuvé et voté par la Knesset, le gouvernement israéliens inclut le projet de 500 logements additionnels à Har Homa, ce qui entraîne de vives critiques de la part de la communauté internationale. La secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice et le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon qualifient cette mesure d’"inutile".

En réponse, le ministre chargé des affaires de Jérusalem, Rafi Eitan, du parti des Retraités déclare le 23 décembre dernier sur les ondes de Galé Tsahal : "Nous n’avons jamais promis à quiconque de geler la construction à Har Homa, puisque ce quartier est situé dans les frontières municipales de Jérusalem. Har Homa fait partie intégrante de Jérusalem et Israël n’y cessera pas les constructions. C’est le devoir d’Israël de fournir à ses citoyens des endroits pour vivre".

Yariv Oppenheimer, responsable du mouvement La Paix maintenant, annonce : "Cette mesure va porter préjudice aux négociations diplomatiques avant même qu’elles ne commencent".

Dernièrement, lors de la venue présidentielle de George W. Bush début janvier 2008, la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice a affirmé dans un entretien publié dans le "Jerusalem Post" que les Etats-Unis considèrent le quartier israélien controversé d’Har Homa à Jérusalem comme une "colonie" à laquelle ils sont opposés et ce dès le début. Selon Mme Rice qui épouse la position palestinienne, ce lotissement est illégal. Selon Israël, ce territoire lui appartient depuis sa victoire de la guerre des Six Jours en 1967. Il entend y appliquer sa souveraineté.


Noémie Grynberg 2008