Daniel Gold, le génial inventeur de « Dôme de Fer »

Dome De Fer

Le système de protection antiaérienne « Dôme de Fer » (Kipat Barzel) s’avère un concentré de technologies mises en place pour prémunir la population israélienne des tirs de roquettes et autres engins conventionnels. Derrière cette invention unique au monde, le Général de Brigade (de Réserve) Daniel Gold, fils d’émigrés hongrois survivants de la Shoah, ancien chef de Recherche et Développement au Ministère israélien de la Défense et de l’Armée de l’Air. Pour honorer sa contribution à la protection du pays, en 2015 il a été choisi pour allumer l’un des 12 flambeaux à la cérémonie du Yom Haatsmaout au Mont Herzl.

Aujourd’hui en Israël, nul ne met plus en doute ni l’efficacité, ni la nécessité du bouclier « Dôme de Fer ». Pourtant, personne n’avait misé sur son succès. Surtout pas les militaires qui se sont opposés, il y a quelques années, à ce projet. Car les généraux préfèrent généralement l’offensive à la défense. Mais en 2006, l’ancien Ministre de la Défense du gouvernement Olmert, Amir Péretz, s’est battu pour leur imposer son intuition. A l’origine de l’invention, Daniel Gold, chef de la Commission nationale israélienne pour la Cyber Recherche & Développement militaire en électronique, communications, technologie de l’information et robotique dont il a supervisé tous les projets et budgets. Ce dernier a ainsi développé un nombre sans précédent de collaborations avec moult pays et organisations. Sous sa direction, l’unité R&D de Tsahal a également reçu sept fois le Prix Israël de la Défense et atteint le leadership mondial dans un grand nombre de domaines technologiques. En 2012, le Général de Brigade a lui-même reçu le Prix Israël de la Défense pour la création de la protection aérienne mobile. Aujourd’hui à 53 ans, ce tsabar né à Tel-Aviv est le PDG et le fondateur de Gold R&D Technologie et Innovation Ltd.

La saga Dôme de Fer

En 2004, le Ministère israélien de la Défense a publié un appel d’offre pour concevoir un système d’interception de roquettes de courte portée. Parmi 24 propositions évaluées, c’est « Dôme de Fer » de la société nationale Rafael Advanced Defence Systems qui est élu. Pendant trois ans, financé en partie par les Etats-Unis, ce « parapluie » antimissile protégeant des tirs ennemis, capable de fonctionner dans toutes les conditions météorologiques, est développé avec la Faculté du Technion, par un docteur en génie électronique spécialisé dans les communications et le traitement du signal, le lieutenant-général Daniel Gold. Pour le concepteur du projet, le défi ne s’avère pas que technologique ; c’est une mission nationale dont les contraintes semblent presque insurmontables. Pour adapter le bouclier à toutes les difficultés, la coopération avec les militaires sur le terrain se montre donc essentielle.

En 2006, la guerre contre le Hezbollah au Liban et en 2008-2009 celle contre le Hamas à Gaza incite finalement le spécialiste à concevoir un système de missiles facile à fabriquer.

Le premier équipement opérationnel est d’abord déployé fin mars et début avril 2011 à Beersheba, puis à Ashkelon. Monté sur des camions, il est simple à déployer le long des frontières israéliennes. Deux autres batteries sont ensuite postées près d’Ashdod, Tel-Aviv et Nétivot. Un cinquième lanceur anti-missile est mis en place fin 2012 à Tel-Aviv. Lors de l’opération « Roc solide » de l’été 2014, le système a permis d’intercepter des dizaines de projectiles menaçant directement les villes peuplées d’Israel avec un taux de réussite de 75 à 90 %. Actuellement, « Dôme de Fer » comporte en tout neuf batteries. Toutefois, d’après les experts militaires, un total de 13 boucliers serait nécessaire pour assurer la couverture complète du territoire israélien.

Comment ça marche ?

Le « Dôme de Fer » a révolutionné la défense israélienne depuis son inauguration opérationnelle en 2012. Chacune de ses batteries semi-mobiles comprend trois parties : un radar de détection et de pistage à même de suivre 200 roquettes différentes par minute en cas de tirs massifs et d’en calculer les trajectoires, un logiciel de contrôle de tir qui détermine le point d’impact et trois lanceurs sol-air équipés chacun de vingt petits missiles d’interception guidés par radar, capables d’anéantir en plein vol non seulement des roquettes de portée très courte, de quatre à soixante-dix kilomètres, mais aussi des obus d’artillerie et de mortier. Le système repère la trajectoire de la roquette depuis son lancement. Si elle doit s’abattre sur une zone habitée, il tire un missile Tamir pour l’intercepter en vol. Les fusées du « Dôme de Fer » sont équipées de capteurs électro-optiques et de plusieurs ailerons de direction pour une plus grande maniabilité. L’algorithme de traitement des trajectoires au niveau de la station radar ou sa capacité à répondre à des salves simultanées est sans cesse perfectionné. Le procédé a été testé avec succès contre des Katioucha et des roquettes de 122 mm de type Grad, de portée inférieure à 30 km, prises au Hezbollah. Pourtant, l’interception des Qassam bricolés avec des composants de fortune et de trajectoires très irrégulières semblait a priori assez aléatoire.

Le temps de prise de décision pour une interception est court, environ deux minutes entre le lancement et l’impact d’un projectile. Aussi le commandement de l’artillerie est-il confié à un chef de batterie qui se réfère à un PC central.

Enfin, chaque unité doit pouvoir se déplacer avec ses hommes à travers le pays en fonction des priorités sécuritaires. Les lanceurs sont posés sur des bases de conteneurs : un générateur électrique et quelques préfabriqués suffisent au bataillon chargé d’actionner le bouclier.

Mais ce système coûte cher, très cher. Chaque batterie s’élève à 500.000 dollars et chaque missile à 60.000 dollars. Israël a déjà investi un milliard de dollars dans le développement et la production de ce matériel, sans compter l’aide du Pentagone estimée à près de 400 millions de dollars pour 2014-2015.


Noémie Grynberg / Israel Magazine 2015